La rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle régit par les articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail est un mode autonome de rupture par lequel l’employeur et le salarié s’entendent pour mettre fin d’un commun accord au contrat de travail à durée indéterminée qui les lie. Elle est soumise à une homologation administrative qui garantit la liberté du consentement du salarié.
Cette rupture conventionnelle, même homologuée, est nulle si le salarié n’a pas reçu un exemplaire de la convention de rupture, ce document devant lui permettre de demander l’homologation administrative ou d’user de sa faculté de rétractation (Cass. Soc. 6 février 2013, n° 11-27.000).
Par ailleurs, la Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur l’impossibilité de conclure une rupture conventionnelle dans un contexte de harcèlement (Cass. Soc. 30 janv. 2013, n° 11-22.332).
Une fois la rupture conventionnelle conclue, le salarié peut agir en nullité de la convention mais il peut également saisir le juge d’une demande en paiement d’un complément d’indemnité (Cass. Soc. 10 décembre 2014 n° 13-22.134).
I- Définition de la rupture conventionnelle
A. Les caractéristiques
* Elle est encadrée par une procédure d’homologation garantissant la liberté du consentement des parties
L’article L. 1237-14 du Code du travail prévoit que l’accord des parties doit être formalisé par une convention de rupture. Un exemplaire doit être transmis à la DIRECCTE.
Le ministère du travail propose un modèle Cerfa qui constitue la convention de rupture et la demande d’homologation (ATTENTION ne concerne pas les ruptures conventionnelles des salariés protégés).
Le formulaire d’homologation permet de vérifier que les règles encadrant la rupture conventionnelle ont bien été respectées.
* Le salarié bénéficie d’une indemnité de rupture exonérée, sous certaines conditions, de charges sociales et d’impôt et d’un montant au moins équivalent à celui de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement.
* La rupture conventionnelle ouvre droit aux allocations d’assurance chômage.
Toutefois, lorsque le salarié perçoit une indemnité de rupture qui dépasse le montant de l’indemnité légale de licenciement, il est soumis à un délai de carence (ou différé d’indemnisation).
Il convient de souligner que depuis le 1er juillet 2014, le délai de carence maximum est passé de 75 à 180 jours.
Le délai de carence est calculé depuis le 1er juillet 2014 en divisant le montant de l’indemnité supra légale par 90 sans que cela ne puisse dépasser 180 jours.
B. Les différentes étapes
1. Un ou plusieurs entretiens
Selon l’article L. 1237-12 du Code du travail, la signature de la convention de rupture doit être précédée d’un ou plusieurs entretiens entre les parties. Il est préférable d’organiser plusieurs entretiens.
Aucun formalisme particulier n’est exigé. Cet entretien peut intervenir de l’initiative du salarié. Il est également conseillé de garder une trace écrite de l’invitation. Dans le cas d’une sollicitation du salarié, l’employeur doit informer le salarié de la date et du lieu de l’entretien.
Les entretiens peuvent être organisés pendant ou en dehors des heures de travail du salarié.
2. Délai de rupture
Aucun délai légal n’a été fixé. Une convention de rupture peut intervenir dès l’entretien.
Conformément à l’article L. 1237-13 du Code du travail, à compter de la signature, le salarié et l’employeur disposent d’un délai de rétractation de 15 jours calendaires. A l’issue de ce délai, une demande d’homologation doit être effectuée auprès de la DIRECCTE.
Un récent arrêt de la Cour de la Cassation vient de confirmer que la législation sociale n’impose aucun délai entre l’entretien au cours duquel les parties conviennent de la rupture et la signature de la convention (Cass. Soc. 3 juillet 2013, n° 12-19.268).
3. Effet de la rupture conventionnelle
Conformément à l’article L.1237-13 du Code du travail, la date de la rupture ne peut intervenir avant le lendemain du jour de la notification d’acceptation de l’homologation.
La rupture conventionnelle d’un salarié protégé ne pourra intervenir que le lendemain de l’autorisation administrative.
La loi n’impose pas aux parties un préavis de rupture. Elles peuvent donc s’entendre sur une date à laquelle elles acquièrent la certitude que l’homologation de la DIRECCTE sera définitivement acquise.
La Cour de cassation a précisé que lorsque la date de la rupture du contrat fixée par la convention de rupture est postérieure à la date de l’homologation, celle-ci peut valablement être portée sur le certificat de travail. En effet, le juge ne peut imposer qu’il soit obligatoirement fait mention de la date de l’homologation (Cass. soc., 18 février 2015, n° 13-23.880).
C. Une convention établie en deux exemplaires originaux au moins
La Cour de cassation s’est prononcée, pour la première fois, sur les conséquences de la non-délivrance au salarié d’un exemplaire de la convention de rupture conclue avec l’employeur. Jugeant que dans ce cas le consentement du salarié n’est pas garanti, elle affirme la nullité de la rupture conventionnelle homologuée (Cass. Soc. 6 février 2013, n° 11-27.000).
Pour l’employeur, la loi ne prévoyant pas l’établissement de la convention en double exemplaire la rupture conventionnelle était valable. Or, saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Lyon avait considéré que l’intégrité du consentement du salarié n’ayant pu être garantie, la rupture conventionnelle, bien qu’homologuée par l’administration, devait être annulée et produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Pour en arriver à cette conclusion, elle s’était fondée sur l’article 1325 du Code civil disposant que les conventions contenant des obligations réciproques, ce qui est le cas de la convention de rupture, ne sont valables que si elles ont été établies en autant d’originaux qu’il y a de parties (CA Lyon 23 septembre 2011, n° 10-09.122).
Si la Cour de cassation écarte le motif de la Cour d’appel fondé sur le droit commun, elle confirme toutefois la solution retenue par les juges du fond. Pour elle, la remise d’un exemplaire au salarié s’impose dans la mesure où l’une ou l’autre des parties doit pouvoir demander l’homologation de l’accord conclu, laquelle s’opère par la remise d’un exemplaire à l’autorité administrative compétente. Pour qu’il puisse le faire, le salarié doit donc être en possession d’un exemplaire. Par ailleurs, les parties disposent d’un droit de rétractation de 15 jours. Or, l’exercice de ce droit suppose que son titulaire ait une exacte connaissance de la teneur de la convention. La liberté de consentement est compromise si le salarié n’est pas en mesure de juger, dans ce délai, les avantages et les inconvénients que présentent pour lui les clauses de la convention qu’il a signée.
En pratique, il est donc recommandé à l’employeur d’établir la convention de rupture en trois exemplaires : le premier qu’il conserve, le deuxième qu’il remet au salarié et le troisième qu’il transmet à l’administration chargée d’homologuer la rupture.
II – Une rupture conventionnelle impossible dans un contexte de harcèlement moral
La Cour de cassation s’est également récemment prononcée sur ce sujet à l’occasion du retour d’une salariée d’un arrêt maladie pour état dépressif directement lié à ses conditions de travail et à des faits de harcèlement moral (Cass. Soc. 30 janv. 2013, n° 11-22.332).
En effet, cette salariée avait signé avec son employeur une rupture conventionnelle contestée par la suite et c’est sans grande surprise que la Haute juridiction approuve les juges du fond en considérant que la situation de violence morale, dans laquelle la salariée était placée au moment de la signature de l’acte, avait vicié son consentement. La rupture doit alors produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il convient toutefois de préciser que l’existence d’un conflit lors de la conclusion d’une rupture conventionnelle, n’affecte pas nécessairement sa validité (Cass. Soc. 23 mai 2013, n° 12-13.865).
Mais le vice du consentement est tout de même retenu en cas de menace ou pression envers le salarié.
La conclusion d’une rupture conventionnelle n’était pas non plus possible au cours de la suspension du contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle mais la Cour de cassation l’a désormais admis dans un arrêt très récent du 30 septembre 2014 (n° 13-16297).
III – La contestation de la rupture conventionnelle par le salarié
A. La demande d’annulation de la rupture conventionnelle
L’article L. 1237-14 du Code du travail prévoit que la demande d’annulation de la rupture conventionnelle doit intervenir dans les 12 mois suivant la date d’homologation. Ainsi dès lors que la demande d’annulation n’est pas faite dans le délai légal, le juge n’a pas à statuer sur la demande de résiliation judiciaire antérieure à la rupture conventionnelle.
La Chambre sociale de la Cour de cassation s’est d’ailleurs récemment prononcée en ce sens alors que le salarié avait fait une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, mais par la suite, une rupture conventionnelle est intervenue et a été homologuée par l’administration. Toutefois, le salarié n’a pas retiré sa demande de résiliation judiciaire (Cass. Soc. 10 avril 2013, n° 11-15.651).
La Cour d’appel a tout comme la Cour de cassation ont débouté le salarié qui demandait l’annulation de la rupture conventionnelle et la condamnation de l’employeur au titre de la résiliation judiciaire alors que celui-ci avait fait la demande d’annulation après avoir été débouté une première fois de sa demande de résiliation judiciaire, soit plus de 12 mois après l’homologation de la rupture conventionnelle.
La Cour de cassation a donc considéré que les juges n’avaient plus à statuer sur la demande de résiliation judiciaire, qui était devenue sans objet, la rupture conventionnelle étant définitive, et ce même si la demande de résiliation judiciaire avait été faite avant la rupture conventionnelle.
Récemment encore, la Chambre sociale de la Cour de cassation a posé le principe selon lequel une clause de renonciation à tout recours juridictionnel dans les 12 mois de l’homologation de la convention ne peut valablement être insérée dans une convention de rupture conventionnelle (Cass. Soc. 26 juin 2013, n° 12-15.208).
En effet, une telle clause devra être réputée non écrite sans pour autant que la validité de la convention ne soit remise en cause.
B. La demande de complément d’indemnité
Récemment, la Cour de cassation a précisé que lorsque le salarié a reçu une indemnité de rupture conventionnelle inférieure au minimum légal, celui-ci peut demander au juge de compléter cette indemnité sans être tenu d’agir en nullité de la convention (Cass. Soc. 10 décembre 2014 n° 13-22.134).
La question sous-jacente soulevée par cet arrêt est de savoir si une indemnité de rupture conventionnelle non conforme pouvait donner lieu à la nullité de la rupture conventionnelle.
Mais la Cour ne donne pas de réponse sur ce point.
En l’état du droit actuel, la nullité de la rupture conventionnelle ne peut intervenir qu’en cas de fraude ou de vice de consentement c’est-à-dire d’erreur sur la valeur de l’objet ou de dol c’est-à-dire de manœuvres de l’employeur.
Mais alors, la Cour de cassation pourrait envisager l’indemnité comme un élément essentiel de la rupture conventionnelle pour prononcer la nullité de la convention.
Dans l’attente d’un avis de la Cour de cassation sur ce point, cet arrêt a le mérite de préciser que la demande de complément d’indemnité est possible pour le salarié et est distincte de la demande d’annulation de la rupture conventionnelle.
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