L’égalité de traitement entre les salariés
La règle « à travail égal, salaire égal » ne peut s’appliquer qu’entre des salariés placés dans une situation identique et oblige l’employeur à assurer l’égalité de rémunération aux salariés effectuant un même travail de valeur égale.
Selon une formulation bien établie de la Cour de Cassation : « la différence de traitement entre les salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence » (Cass. Soc. 15 mai 2007, n° 05-42.894).
L’employeur doit justifier les différences de rémunération entre salariés par des éléments objectifs, pertinents et vérifiables.
La Cour de cassation n’a de cesse de faire respecter ce principe, et même de le renforcer au regard des récents arrêts rendus, notamment celui du 6 mai 2015.
Des particularités sont toutefois à noter en matière de protection sociale complémentaire.
1. L’application du principe de l’égalité de traitement
a. La règle posée par le Code du travail
Les articles L. 3221-2 et suivants du Code du travail, imposent à l’employeur d’assurer pour un même travail de valeur égale, une égalité de rémunération.
Un employeur doit donc attribuer les mêmes droits à ses salariés selon le principe d’égalité de traitement.
En vertu de l’article L. 3221-4 du Code du travail, ont une valeur égale, « les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ».
Seules seront donc admises les différences de traitement justifiées par des éléments objectifs, pertinents et vérifiables.
b. Les différences de traitements justifiées
La Chambre sociale de la Cour de cassation a précisé que des contraintes de travail de nuit différentes peuvent justifier une différence de rémunération (Cass. Soc. 5 juin 2013, n° 11-21.255).
Elle estime aussi que la disparité de rémunération avec un salarié rétrogradé ayant conservé un salaire supérieur est justifiée (Cass. Soc. 27 mars 2013, n° 12-15.205).
Concernant la différence de diplôme, la Cour de cassation retient que pour justifier des salaires d’embauche supérieurs à celui d’un salarié en poste titulaire des mêmes diplômes, et exerçant les mêmes fonctions, un employeur doit établir des difficultés matérielles locales de recrutement.
c. Les différences de traitement injustifiées
Le 29 janvier 2014, la Cour de cassation a fait droit à la demande de rappel de salaires d’un salarié soutenant qu’il avait subi une différence de traitement par rapport à un salarié embauché au même poste que lui (Cass. Soc. 29 janvier 2014, n° 12-20.780).
Si pour l’employeur, la différence de traitement était justifiée par la différence d’expériences et de diplômes (niveau Bac +3 pour l’un et niveau bac + 4 pour l’autre), la Cour a rappelé le principe selon lequel la différence de diplôme ne saurait justifier à elle seule une différence de traitement entre deux salariés exerçant des missions équivalentes dans un même service en l’absence d’élément objectif.
Plus récemment encore, la Cour de cassation a décidé que l’absence d’augmentation de salaire d’un salarié par rapport aux autres salariés de l’entreprise devait être justifiée par des d’éléments objectifs et matériellement vérifiables (Cass. Soc. 6 mai 2015, n° 13-25.821).
Ainsi, pour la Cour, les décisions d’augmentation individuelle doivent reposer d’une part sur des facteurs objectifs à savoir des éléments chiffrés tels que les résultats du salarié, et des facteurs subjectifs c’est-à-dire attachés à la personne du salarié.
L’employeur ne peut donc pas simplement se fonder sur les performances d’un salarié ou d’un service pour justifier une absence d’augmentation individuelle de salaire.
Enfin, signalons un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris en 2013, obtenu par Maître Dahlia ARFI-ELKAïM, dans lequel le principe « à travail égal, salaire égal » a reçu application pour deux salariés travaillant dans la même entreprise mais exerçant des fonctions différentes (CA PARIS, Pôle 6 – Chambre 6, 30 octobre 2013, RG S 12/02807).
2. L’application du principe en matière de protection sociale complémentaire
Le décret n° 2012-25 du 9 janvier 2012 (JO 11 janvier) relatif au caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire a fait de l’égalité de traitement une condition d’application du régime social de faveur. Toutefois, certaines différences de traitement peuvent être justifiées.
En effet, les régimes de protection sociale complémentaire répondent à des besoins de garanties qui, sauf cas très exceptionnels, sont sans rapport avec l’activité professionnelle des salariés. Ces besoins sont, dans la plupart des cas, fonction de leur statut, de l’historique de la carrière et surtout du niveau de rémunération.
Dans un arrêt de janvier 2012 (Cass. Soc. 11 janvier 2012, n° 10-15806), la Haute Juridiction a rejeté le pourvoi d’un salarié se plaignant d’une différence de traitement résultant des modalités de gestion des régimes de retraite complémentaire.
Elle a retenu que cette différence de traitement « trouvait sa cause dans la diversité et l’autonomie des régimes de retraite complémentaire relevant d’organismes distincts et l’évolution de la norme juridique applicable ». Et pour cause, le caractère catégoriel de ces garanties est inhérent à l’objectif même assigné à la protection sociale complémentaire, puisque le régime de base et les régimes complémentaires de retraite placent les salariés dans des situations différentes.
Plus récemment, la Cour de cassation a validé les avantages « catégoriels » en matière de prévoyance en considérant que l’égalité de traitement ne s’applique qu’entre les salariés relevant d’une même catégorie professionnelle (Cass. Soc. 13 mars 2013, n° 11-20.490).
Elle admet en effet que l’entreprise mette en place une mutuelle prévoyant un financement différent selon les catégories professionnelles, l’employeur prenant en l’espèce l’intégralité des cotisations dues par les cadres et agents de maîtrise en charge, mais seulement 60 % de celles dues par les autres catégories de personnel.
Pour la Cour, les régimes de prévoyance reposent sur une évaluation des risques garantis en fonction des spécificités de chaque catégorie professionnelle, qui prennent en compte un objectif de solidarité et qui requièrent, dans leur mise en œuvre, la garantie d’un organisme extérieur à l’entreprise. Ainsi, l’égalité de traitement ne s’applique qu’entre les salariés relevant d’une même catégorie professionnelle.
La Cour de cassation admet donc sans réserve des différences de traitement entre des catégories distinctes de salariés s’agissant de leur protection sociale complémentaire couvrant les risques maladie, incapacité, invalidité, décès et retraite. Ainsi, l’employeur (ou l’accord collectif) peut instituer un régime de prévoyance au profit d’une seule catégorie de salariés. En cas de régime couvrant l’ensemble du personnel, il peut y avoir des différences de traitement entre les différentes catégories professionnelles, que cela concerne le financement du régime ou les prestations garanties.
La règle que la Cour avait elle-même dégagée à propos des avantages catégoriels selon laquelle, en cas d’attribution d’un avantage, l’appartenance à une catégorie professionnelle n’est pas suffisante en elle-même pour justifier une différence de traitement (Cass. Soc. 8 juin 2011 n° 10-14.725) n’a donc pas vocation à s’appliquer aux régimes de prévoyance.
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