La clause de non-concurrence : un régime juridique strict et une contrepartie financière très encadrée
Afin de protéger leurs intérêts, les entreprises peuvent insérer une clause de non-concurrence dans le contrat de travail de leurs salariés.
En vertu de cette clause, le salarié s’engage à ne pas travailler pour une entreprise concurrente ou à ne pas exercer une activité concurrente pendant un certain temps et dans une zone géographique limitée. En contrepartie, l’entreprise verse une contrepartie financière au salarié.
C’est une clause particulière dans la mesure où elle a vocation à s’appliquer à l’issue du contrat de travail.
Cette clause se heurtant au principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle, son régime est très strict que ce soit dans sa mise en œuvre ou encore concernant sa résiliation. De plus, les conditions tenant à la contrepartie financière sont très encadrées comme l’a récemment prouvé la Cour de cassation (Cass. Soc. 9 avril 2015, n° 13-25.847).
1. Les conditions de validité de la clause de non-concurrence
Pour être valable, la clause de non-concurrence doit remplir plusieurs conditions cumulatives :
– être insérée dans le contrat de travail ;
– être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ;
– limitée dans le temps et l’espace ;
– tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
– donner lieu à une contrepartie financière (Cass. Soc. 10 juillet 2002, n° 00-45.135).
Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplis, la clause de non-concurrence est nulle.
Plus particulièrement, la Cour de cassation est très exigeante concernant cette contrepartie financière.
Par exemple, la Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises qu’une contrepartie financière dérisoire à la clause de non-concurrence
contenue dans un contrat de travail équivaut à une absence de contrepartie, tel est le cas lorsque la contrepartie financière représente un dixième de la rémunération du salarié (Cass. Soc. 15 novembre 2006, n° 04-46.721).
Le caractère dérisoire de la contrepartie financière est soumis à l’appréciation du juge qui peut substituer son appréciation du montant de cette contrepartie à celle fixée par les parties mais qui ne peut toutefois pas accorder au salarié la contrepartie qu’il estime justifiée après avoir décidé de l’annulation de la clause dans la mesure ou la contrepartie n’existe plus. Des dommages et intérêts seront toutefois accordés au salarié (Cass. Soc. 16 mai 2012, n° 11-10760).
Plus récemment, la Cour de cassation a eu l’occasion de poser le principe selon lequel doit être réputée non écrite la minoration par les parties de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence, dans le cas d’un mode déterminé de rupture du contrat de travail à savoir en l’espèce d’une rupture conventionnelle (Cass. Soc. 9 avril 2015, précité).
Toutefois, paradoxalement, la Cour de cassation a jugé que le salarié n’était pas forcément libéré de son obligation de non-concurrence malgré le non-paiement de la contrepartie financière par son ancien employeur après son départ de l’entreprise. (Cass. Soc. 20 novembre 2013, n° 12-20074).
2. L’application de la clause de non-concurrence
La clause de non-concurrence, lorsqu’elle remplit toutes les conditions de validité, s’applique lorsque le contrat prend fin c’est-à-dire à la date effective de la fin du contrat de travail soit à l’issue de la période de préavis, ou à la date de départ du salarié de l’entreprise en cas de dispense de préavis.
Par l’application de cette clause, la liberté du salarié est limitée en ce qu’il ne peut exercer des fonctions équivalentes chez un concurrent ou à son propre compte.
C’est en cela que la contrepartie financière est nécessairement due dès lors que la clause de non concurrence est applicable.
Le salarié qui ne respecte pas son obligation de non-concurrence peut être condamné par le Conseil de prud’hommes à rembourser les indemnités de non-concurrence qui lui ont été versées, à faire cesser sa nouvelle activité et parfois même à verser des dommages et intérêts à son ancien employeur.
3. Les conséquences lorsque la clause de non-concurrence est entachée de nullité
Si le salarié n’a pas de clause de non concurrence ou si cette clause est nulle, il retrouve, après la rupture de son contrat, une totale liberté de travail et peut faire concurrence à son ancien employeur sous réserve de ne pas commettre d’actes de concurrence déloyale.
Jusqu’à présent, le salarié qui avait respecté une clause de non-concurrence illicite, c’est-à-dire ne respectant pas une des conditions précitées, avait automatiquement droit à des dommages et intérêts. En effet, pour la Cour de cassation, le respect par un salarié d’une clause illicite lui causait « nécessairement » un préjudice dont il appartennait au juge d’en apprécier l’étendue (Cass. Soc. 22 mars 2006, n° 04-45.546). Le salarié avait donc droit à une indemnité sans avoir à établir la nature ou l’étendue de son préjudice (Cass. Soc. 12 janvier 2011, n° 08-45.280).
La Chambre sociale de la Cour de cassation est toutefois revenue sur cette jurisprudence et considère désormais que le salarié n’obtiendra réparation que s’il a subi un réel préjudice. Elle a par ailleurs précisé que « l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fonds » (Cass. Soc. 25 mai 2016, n°14-20.578).
En tout état de cause, le salarié conserve l’indemnité de non-concurrence dès lors qu’il a respecté l’interdiction (Cass. Soc. 28 octobre 1997, n° 94-43.792). Ainsi, le salarié peut valablement solliciter le versement de l’indemnité correspondante à la durée pendant laquelle il a respecté l’obligation de non-concurrence (Cass. Soc. 6 avril 2011, n° 09-67.498).
Enfin, seul le salarié peut agir en nullité de la clause de non-concurrence insérée dans son contrat de travail (Cass. Soc. 2 juillet 1984, n° 82-41.021).
En effet, l’employeur n’est pas recevable a soulever la nullité de la clause de non-concurrence, ni un nouvel employeur (Cass. Soc. 4 juillet 2007 nº 05-17.520).
4. La renonciation à la clause non-concurrence
Dans une optique de protection du salarié, la renonciation à la clause de concurrence est également très encadrée.
Par cet arrêt du 13 mars 2013, la Cour de cassation a en effet décidé qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence et donc la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de l’indemnité de non-concurrence est celle du départ effectif de l’entreprise.
Il en résulte que si le salarié est dispensé d’effectuer son préavis, l’employeur qui veut renoncer à la clause de non-concurrence doit le faire avant le départ effectif du salarié de l’entreprise et doit donc l’informer au plus tard dans la lettre de licenciement et ne peut le faire en cours de préavis (Cass. Soc. 13 mars 2013, n° 11-21.150).
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